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Rousseau et la solution donnée par le contrat social.

28 Janvier 2014 , Rédigé par Laurent Robichon-Leclerc Publié dans #Critiques

Il est parfois nécessaire de restreindre sa liberté pour «veiller à sa propre conservation, à ses propres soins[1]». Par exemple, les paysans endurent les exigences de leur roi en échange de la tranquillité civile et de leur protection contre les ennemis tant internes qu’externes à l’État. Or, «renoncer à sa liberté c’est renoncer à sa qualité d’homme, aux droits de l’humanité, même à ses devoirs.»[2] L’asservissement d’un peuple à un seul est une relation qui s’associe bien plus au type maitre-esclave que chef-peuple, entre autres parce que le gouvernant recherche la satisfaction de ses intérêts particuliers bien avant ceux du peuple[3]. Ainsi, «céder à la force est un acte de nécessité, non de volonté; c’est tout au plus un acte de prudence»[4]. En ce sens, la force ne fait pas le droit, car si «le plus fort a toujours raison, il ne s’agit que de faire en sorte qu’on soit le plus fort.»[5] De cette façon, «puisqu’aucun homme n’a une autorité naturelle sur son semblable, et puisque la force ne produit aucun droit, restent donc les conventions pour base de toute autorité légitime parmi les hommes.»[6]

Donc,

«Trouver une forme d’association qui défende et protège de toute la force commune la personne et les biens de chaque associé, et par laquelle chacun s’unissant à tous n’obéisse pourtant qu’à lui-même et reste aussi libre qu’auparavant? » Tel est le problème fondamental auquel le contrat social donne la solution.[7]

La réponse apparait lorsque

Chacun de nous met en commun sa personne et toute sa puissance sous la suprême direction de la volonté générale; et nous recevons en corps chaque membres comme partie indivisible du tout. […] Cet acte d’association produit un corps moral et collectif, […] un moi commun.[8]

«Ainsi, le devoir et l’intérêt obligent […] les deux parties contractantes à s’entraider mutuellement […] puisqu’il est impossible que le corps veuille nuire à ses membres.»[9] Ce que l’homme perd par le contrat social, c’est sa liberté naturelle, celle qui n’a pour bornes que les forces de l’individu[10]. En contrepartie, le citoyen y gagne deux libertés. D’une part, la liberté civile, car «quiconque refusera d’obéir à la volonté générale y sera contraint par tout le corps; ce qui ne signifie autre chose sinon qu’on le forcera d’être libre»[11]. D’autre part, la liberté morale «car l’impulsion du seul appétit est esclavage, et l’obéissance à la loi qu’on s’est prescrite est liberté.»[12]

Toutefois, le corps social peut perdre de sa souveraineté et donc de sa capacité à combler le bien commun. Cela est possible lorsque l’entité globale (la société) se subdivise en parts. De cette façon, le bien commun n’est plus redistribué entre tous les membres du corps social, mais entre les diverses associations de telle sorte «qu’il n’y a plus autant de votants que d’hommes, mais seulement autant que d’associations.» Cela cause des inégalités, car le poids, l’influence, le pouvoir de chaque association sont différents. Ainsi, «s’il y a des sociétés partielles, il en faut multiplier le nombre et en prévenir l’inégalité.»[13]

Lorsqu’il existe un litige, la situation passe de commune à particulière, car nous sommes en présence de deux partis avec chacun des intérêts particuliers, de telle sorte que chaque parti ne recherche plus le bien commun, mais leur bien propre, biaisant ainsi leurs jugements. Dès lors, la meilleure façon d’établir une justice équitable réside dans un jugement basé sur des conventions parce qu’elles sont élaborées sur des principes généraux qui sont transposables aux cas particuliers[14].

[1] ROUSSEAU, Jean-Jacques. «Chapitre I : Sujet de ce premier Livre», Du contrat social : Livre I, Éditions GF Flammarion, Paris, p. 43.

[2] ROUSSEAU, Jean-Jacques. «Chapitre IV : De l’esclavage», […], p. 46.

[3] ROUSSEAU, Jean-Jacques. «Chapitre V : Qu’il faut toujours remonter à une première convention, […], p. 50.

[4] ROUSSEAU, Jean-Jacques. «Chapitre III : Du droit du plus fort», […], p. 45.

[5] ROUSSEAU, Jean-Jacques. «Chapitre III : Du droit du plus fort», […], p. 45.

[6] ROUSSEAU, Jean-Jacques. «Chapitre IV : De l’esclavage», […], p. 46.

[7] ROUSSEAU, Jean-Jacques. «Chapitre VI : Du pacte social», […], p. 52.

[8] ROUSSEAU, Jean-Jacques. «Chapitre VI : Du pacte social», […], p. 53.

[9] ROUSSEAU, Jean-Jacques. «Chapitre VII : Du souverain», […], p. 55.

[10] ROUSSEAU, Jean-Jacques. «Chapitre VIII : Du l’État civil», […], p. 57.

[11] ROUSSEAU, Jean-Jacques. «Chapitre VII : Du souverain», […], p. 56.

[12] ROUSSEAU, Jean-Jacques. «Chapitre VIII : Du l’État civil», […], p. 57.

[13] ROUSSEAU, Jean-Jacques. «Chapitre III : Si la volonté générale peut errer», Du contrat social : Livre II, Éditions GF Flammarion, Paris, p. 65.

[14] ROUSSEAU, Jean-Jacques. «Chapitre VI : De la loi», […], p. 73.

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