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La distinction que Constant fait entre la liberté des anciens et celle des modernes

28 Janvier 2014 , Rédigé par Laurent Robichon-Leclerc Publié dans #Critiques

La liberté des anciens

consistait à exercer collectivement, mais directement, plusieurs parties de la souveraineté, […] à délibérer, […] à vote des lois, à prononcer les jugements, à examiner les comptes, les actes, la gestion des magistrats, à les condamner ou à les absoudre.[1]

Cette liberté «est l’assujettissement complet de l’individu à l’autorité de l’ensemble. […] Toutes les actions relevant de l'espace privé, tels que le libre choix de son culte ou l'expression sans entrave de ses opinions, sont surveillées et ultimement, jugées de façon arbitraire et définie par celles pratiquées par la majorité.

La liberté des modernes est

pour chacun le droit de n’être soumis qu’aux lois, de ne pouvoir ni être arrêté, ni détenu, ni mis à mort, ni maltraité d’aucune manière, par l’effet de la volonté arbitraire; […] de dire son opinion, de choisir son industrie et de l’exercer, de disposer de sa propriété, […] d’aller et de venir sans permission, […] de se réunir à d’autres, […] de professer le culte que l’on préfère […] et, enfin, c’est le droit […] d’influer sur l’administration du gouvernement.[2]

Ainsi, la différence principale entre les deux types de liberté réside dans le mécanisme de son épanouissement. L’ancienne forme prescrit une émancipation de l’entité politico-sociale au grand dam de l’autonomie humaine. Inversement, la liberté moderne renforce l’individualisme, d’où le danger qu’étant trop absorbés par notre indépendance privée, nous renoncions trop facilement à nos droits politiques[3]. De plus, bien qu’elle mette l’emphase sur notre bonheur individuel, se limiter à cet objectif n’est pas dans notre nature : nous voulons étendre nos lumières et développer nos facultés, et surtout, nous poursuivons le perfectionnement de notre destin[4]. À cet égard, la liberté politique constitue le moyen par excellence.

Donc, pour être libre de façon optimale, il suffit de combiner les deux types de liberté par l'établissement d'un système représentatif. Celui-ci procure l’avantage de décharger les individus des décisions de la sphère publique, ce qui leur laisse plus de temps pour la jouissance de leurs activités privées[5]. Toutefois, il est requis qu’une surveillance serrée du peuple sur le gouvernement ait lieu afin de se prémunir contre la négligence et la corruption. Cela passe par divers mécanismes tels que des intervalles de gouvernances raisonnablement espacés, ou encore, la capacité d’écarter du pouvoir ceux qui trompent le peuple. De plus, le législateur qui n’a pour tâche de rendre la population tranquille est insuffisant en soi : «il faut que les institutions achèvent l’éducation morale des citoyens»[6].

[1] CONSTANT, Benjamin. «De la liberté des anciens comparée à celle des modernes», […], p. 594.

[2] CONSTANT, Benjamin. «De la liberté des anciens comparée à celle des modernes», […], p. 593.

[3] CONSTANT, Benjamin. «De la liberté des anciens comparée à celle des modernes», […], p. 616.

[4] CONSTANT, Benjamin. «De la liberté des anciens comparée à celle des modernes», […], p. 617.

[5] CONSTANT, Benjamin. «De la liberté des anciens comparée à celle des modernes», […], p. 615.

[6] CONSTANT, Benjamin. «De la liberté des anciens comparée à celle des modernes», […], p. 619.

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